MONTHERLANT (de), Henry (1895-1972)

Lettre autographe signée « Montherlant » [à Thierry Maulnier]
S.l., 3 déc. [19]50, 4 p. in-8°

« Et je ne comprends pas non plus que vous m’appeliez un dramaturge psychanalyste… »

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Fiche descriptive

MONTHERLANT (de), Henry (1895-1972)

Lettre autographe signée « Montherlant » [à Thierry Maulnier]
S.l., 3 déc. [19]50, 4 p. in-8°

Réaction au ton aigre-doux de Montherlant suite à une critique de Maulnier de sa pièce Celles qu’on prend dans ses bras

Enrichie d’une signature spectaculaire


« Cher Monsieur,
Je vous remercie pour votre prise de position et celle en faveur de ma dernière pièce, dans la Revue de Paris. Voilà une opinion qui, à elle seule, devrait faire pencher la balance de mon côté, contre tous les autres.
Votre article du Rouge et noir contenait lui aussi quelques une de ces phrases qui sont miel pour l’auteur qui les lit. Mais j’avais été un peu hérissé par quelques autres : Vous parlez, en ce qui me concerne, (une donnée indigne de vous) – [que] je suis notre misogyne national. De là vous écrivez : “Ravier [l’antiquaire, 58 ans, épris de Christine, 18 ans, qui lui résiste] a les femmes en aversion”. Ou voyez-vous cela ? Ce personnage parle avec colère contre sa Christine, mais pourquoi ? Par dépit d’amour, par rage de n’être pas aimé. C’est le contraire de l’aversion.
Et je ne comprends pas non plus que vous m’appeliez “un dramaturge psychanalyste”.
Certes ce qualificatif attirera sur moi, ici et là, des mentions, des sympathies nouvelles. Mais pourquoi pas, simplement, “un dramaturge psychologue” ?
Croyez que je ne cesse de vous lire tenir comme une des plus sûres “valeurs” de notre vie littéraire, et agréez, je vous prie, cher monsieur, mes sentiments…
Montherlant »


S’il tient ici à démentir toute misogynie dans sa pièce, l’œuvre de Montherlant n’en reste pas moins traversée par une forme d’hostilité à l’égard des femmes. Simone de Beauvoir le souligne en lui consacrant la première partie du deuxième chapitre de la troisième section (« Mythes ») de son essai Le Deuxième Sexe (1949). C’est d’ailleurs depuis son roman cyclique Les Jeunes Filles, qu’il publie entre 1936 et 1939, que Montherlant nourrit cette image négative des femmes, qui finira par perdurer. Jacques Laurent tempère toutefois ce trait de caractère : « Il y a chez lui un peu de misogynie — mais pas systématique, sans méchanceté… et en général amusante. Il ne faut pas la ramener (comme l’a fait par exemple Pierre Sipriot) à son homosexualité.

Pièce en trois actes représentée pour la première fois en 1950 au Théâtre de la Madeleine, Celles qu’on prend dans ses bras rencontre un vif succès et sera reprise, sept and plus tard, au Théâtre des Ambassadeurs. De cette pièce, Gabriel Marcel dira « Rien sans doute d’aussi racinien n’a été écrit depuis Racine » dans Les Nouvelles littéraires du 28 février 1957. 

Provenance :
Archives Thierry Maulnier