[AURY] MAULNIER, Thierry (1909-1988)
Deux cartes-lettres autographes signées « Jacques » à Dominique Aury
Paris, les 3 et 7 août [1936], en tout 2 pp. in-8°
« D’heure en heure… il me semble que je supporte moins ton absence »
Fiche descriptive
[AURY] MAULNIER, Thierry (1909-1988)
Deux cartes-lettres autographes signées « Jacques » à Dominique Aury
Paris, les 3 et 7 août [1936], en tout 2 pp. in-8°
Adresses autographes, chacune timbrée et oblitérée
Légères insolations
Deux lettres empreintes d’affection adressées à son amante Dominique Aury, dont la présence lui manque profondément
« Paris, dimanche » [3 août 1936]
« Annette, mon cher amour, j’ai reçu ton mot, et je voudrais te répondre une longue lettre : mais je n’ai pas le temps aujourd’hui, parce qu’il me faut, avant mercredi, faire un tas d’articles en retard.
Je pense qu’après être venu te voir, je partirai en vacances quelques jours […] et, certainement, le 19 août je pourrai aller au moins quelques heures à ta rencontre.
Moi aussi, Annette, il me semblait, quand nous nous sommes quittés, que tu partais jusqu’au lendemain, comme les autres jours ; et c’est seulement quand tu as tourné le coin de la rue, que j’ai commencé à comprendre que cinq longues journées allaient se passer, sans que je te revoie : et d’heure en heure, depuis, il me semble que je supporte moins ton absence […]
Annette, mon amour, je serai au rendez-vous mercredi, à l’heure convenue, et je te verrai, je t’aime.
Jacques »
« Paris, 7 août » [1936]
«Mon cher amour, lorsque tu recevras ce mot, je serai sans doute arrivé à Schlucht [col de la Schlucht, dans le massif des Vosges], et, dès demain, je t’écrirai une longue lettre. […]
Cette journée de mercredi, mon amour, a été bien courte, et j’ai maintenant recommencé à attendre le prochain mercredi où je te verrai. Seulement, il faut, cette fois, attendre un peu plus longtemps. Pourquoi donc, Annette, est-ce toujours non pas au moment même où nous nous quittons, mais seulement un peu plus tard, que je comprends vraiment que tu es partie.
Peut-être, -peut-être- profiterai-je un peu de ces courtes vacances, si j’ai du courage, s’il pleut, pour commencer à travailler au fameux roman¹. Mais je voudrais, mon amour chéri, que toi aussi tu travailles : toi aussi, il y a longtemps que tu me l’as promis.
Annette, mon amour, je t’écrirai demain. Les journées sont interminables. Je t’aime.
Jacques »
Dominique Aury, de son véritable nom Anne Cécile Desclos, fait la connaissance de Thierry Maulnier — pseudonyme de Jacques Talagrand — en 1933, par l’entremise d’un ami commun. Leur relation, tenue secrète, se prolonge sur huit années, au cours desquelles Aury trouve la force de divorcer d’un époux violent, expérience dont elle s’inspirera en partie pour rédiger, après la Seconde Guerre mondiale, Histoire d’Ô. À partir de 1937, Maulnier, idéologue d’extrême droite acquis aux théories maurassiennes depuis ses années au lycée Louis le Grand aux côtés de Brasillach, fonde l’hebdomadaire L’Insurgé afin de s’opposer au Front populaire. Il y fait régulièrement publier, dans la rubrique consacrée aux arts, des articles que son « Annette » signe, s’inspirant du nom de sa mère Louise Auricoste, du pseudonyme androgyne de Dominique Aury, sans que le le comité de rédaction lui-même découvre avant longtemps l’identité ni même le sexe de l’autrice.
1- Maulnier ne publiera pas de roman. En marge de son travail de journaliste, il rédige essai idéologique, Au-delà du nationalisme, paru en 1937, puis une étude littéraire, Introduction à la poésie française (préfacé par son amante Dominique Aury), paru en 1939.
Provenance :
Archives Thierry Maulnier