SALES (de), François (1567-1622)

Lettre autographe signée « Françs. E. de Geneve » à Madame de Charmoysi-Marclaz
S.l., 20 may 1606, 2 p. 1/2 in-4°

« C’est grand cas que je ne puis m’empescher de vous parler des exercices du cœur et de l’ame »

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Fiche descriptive

SALES (de), François (1567-1622)

Lettre autographe signée « Françs. E. de Geneve » à sa cousine Madame de Charmoysi-Marclaz
S.l., 20 may 1606, 2 p. 1/2 in-4°
Traces de pliures, cachet gaufré
Adresse autographe sur la quatrième page : “+ A Madame ma cousine / Madame de Charmoysi / Malcaz”
Apostille autographe en fin de lettre du chanoine Joseph Falcaz, sur sept lignes
Joint : une enveloppe avec mention : “Lettre de St. françois de sales n°1412 / n°1323”, sans doute de la main de Falcaz

Rare lettre spirituelle de François de Sales à sa cousine


« Madame ma cousine, Il faut que je commence ma lettre en vous demandant pardon d’une faute que j’ay faite, mais je vous asseure, sans aucune malice, par une pure inadvertence. On m’a apporté la lettre cy jointe comme venante de vostre part, et moy qui, à la verité, suis chaud à sçavoir de vos nouvelles, je l’ay tout soudainement ouverte, sans considerer l’inscription ; et voyant au dedans la main de M. de Charmoysi mon cousin, je n’eusse pas pour cela laissé de la lire, si je n’y eusse reconnu le mot de vos amitiés particulieres. Recevés-la donq, s’il vous plaist, apres qu’elle a esté ouverte, mais tout de mesme comme si elle ne l’avoit pas esté, et pardonnés à ma precipitation qui a deceü le réspéct que je porte et à l’escrivain et à vous. J’eusse bien pu r’habiller la faute et la vous rendre imperceptible, mais j’ayme mieux me confier en vostre bienveuillance, qu’en mon artifice, et ne laissés pas, je vous supplie, Madame ma chere cousine, de me croire fort, fidele en tout ce qui regardera vostre service, car je le seray toute ma vie autant que nul homme du monde.
Je garderay donques, comme vous l’ordonnez, les cent escus, et y feray joindre le reste que ma bonne mere vous doit, laquelle avec tous ses enfans, non seulement se sentent deobligés de vous rendre vostre bien à vostre besoin, mais fondre tout le leur pour vostre service.
Vous ne sçauriés sans doute, Madame ma chere cousine, communiquer vos desplaysirs, petitz ou grandz, non plus que vos contentemens, à une ame plus sincere en vostre endroit ni plus entierement vostre que la mienne, et ne doutés nullement que je n’observe avec toute fidelité le secret au­quel, outre la loy commune, la confiance que vous prenés en moy me lie indissolublement. Je recommanderay l’affaire à nostre Seigneur, et tout maintenant que je vay à l’autel. J’ay esté consolé de voir que vous vous remettés en la providence de Dieu. C’est bien dit, ma chere cousine, il le faut tous-jours faire et en toutes occurrences, et quand vous vous accoustumerés de faire souventesfois cette remise, non de bouche seulement, mais de cœur et profondement, et sincerement, croyés que vous en ressentirés des effectz admirables. C’est grand cas que je ne puis m’empescher de vous parler des exercices du cœur et de l’ame. C’est parce que je n’ayme pas seulement la vostre, mais je la cheris tendrement devant Dieu qui, à mon advis, desire beaucoup de devotion d’elle. Allés cependant tout bellement aux exercices de l’exterieur ; et ne vous chargés pas d’aller à saint Claude à pied, non plus que ma bonne tante du Fong, la quelle n’est plus de l’aage au quel elle y alla quand je l’accompaignay. Portés-y vostre cœur bien fervent, et soit à pied ou à cheval, ne doutés point que Dieu ne le regarde et que saint Claude ne le favorise.
Nostre Sauveur soit à jamais vostre protection, et je suis,
Madame ma cousine,
Vostre cousin et serviteur plus humble,
Franç[oi]s, E[vesque], de Geneve
P.S. Toute vostre petite troupe va bien, et Bonaventure va guerissant. »


Né dans une famille noble de Savoie, François de Sales fait le choix de se consacrer entièrement à Dieu, abandonnant ses privilèges et ses titres. Théologien de grande renommée, il s’impose comme un prédicateur écouté, tout en occupant le siège épiscopal de Genève. Avec Jeanne de Chantal, il fonde l’ordre de la Visitation, laissant une empreinte durable dans l’histoire religieuse. Sa voix résonne autant dans les cercles ecclésiastiques que dans les sphères politiques, auprès notamment des ducs Charles-Emmanuel Ier et Victor-Amédée Ier de Savoie, de la régente Christine de France, ainsi que des rois Henri IV et Louis XIII. Également écrivain, il laisse une œuvre abondante, marquée par une profonde réflexion spirituelle. En 1923, l’Église catholique le proclame saint patron des journalistes et des écrivains, en raison de son usage précurseur de l’imprimerie. Ses écrits figurent parmi les premières publications catholiques diffusées sous forme de journaux.

Provenance :
Coll. Blaise
Coll. Claude-Marie Magnin
Coll. particulière

Bibliographie :
Œuvres complètes, t. 10, éd. Louis Vivès, 1875, XLII (pp. 162-163)