DESNOS, Robert (1900-1945)

Lettre autographe signée « Robert Desnos » à Jean Carrive
S.l.n.d., [Paris, 15 mai 1923], 1 p. in-4°

« Je relis Sade – Borel et… et la connerie »

EUR 2.500,-
Fiche descriptive

DESNOS, Robert (1900-1945)

Lettre autographe signée « Robert Desnos » à Jean Carrive
S.l.n.d., [Paris, 15 mai 1923], 1 p. in-4°
À en-tête du Paris-Journal
Enveloppe autographe jointe, timbrée et oblitérée
Très légère fente au pli, un mot caviardé par Desnos

Les lectures de Desnos et sa contribution à la revue Littérature

LETTRE ENRICHIE D’UN DESSIN SIBYLLIN DU POÈTE


« Mon cher Carrive,
J’attends. Je relis Sade – Borel et… et la connerie.
Envoyez please. 
Collaborer à Littérature ? [revue dirigée par Breton] mais oui.
Numéro de 10 est parue hier avec lettres de Lautréamont.
J’envoie Maldoror aujourd’hui.
Ami ? 
Robert Desnos »


Média essentiel de l’avant-garde fondé en 1919, la revue Littérature marque les premiers coups d’éclat du groupe dadaïste Aragon-Breton-Soupault. Lorsque le mouvement Dada est a son apogée entre les années 1920-1921, la revue bénéficie de nombreuses collaborations de figures émergentes telles Ernst, Picabia ou encore Tzara. Après une interruption d’un an, une deuxième série est lancée au printemps 1922 sous la direction, cette fois, du binôme Breton-Soupault. Elle marque rapidement sa rupture définitive avec Dada et voit de nouveaux contributeurs comme Desnos. Consacré à Lautréamont, le numéro 10 ici évoqué comprend une introduction d’Éluard aux lettres de ce dernier, ainsi que des contributions d’Aragon, de Desnos (avec deux poèmes), de Picabia et de Breton.
Dans une lettre envoyée quarte jours plus tôt à Pierre Picon, Desnos marquait son admiration de Sade en ces termes : « Est-il vrai que vous n’aimez pas Sade ? Sans doute ne le connaissez-vous pas ? C’est le type le mieux de tous les temps et de tous les pays. »

Desnos enrichit sa lettre d’un dessin original :
Surmonté de l’inscription « Transatlantique », le dessin met en relation un navire en mer et un poteau télégraphique. L’oriflamme du bâtiment porte le sigle C.G.T. (Compagnie générale transatlantique), tandis que le mot « Volubilis » apparaît fragmenté en deux éléments, disposés à la fois sous les fils du poteau et sur la surface des flots. Cette référence renvoie à une formule célèbre de Desnos — « Le volubilis et je sais l’hypoténuse » — énoncée en présence d’André Breton lors d’une séance de sommeil hypnotique le 28 septembre 1922. Breton avait d’ailleurs annoncé, dans Littérature, nouvelle série, n°8 (janvier 1923), la publication prochaine d’un ensemble intitulé Poèmes, comprenant un extrait de Le Volubilis et je sais l’hypoténuse, présenté comme devant paraître à Barcelone en tirage très limité (cinq exemplaires). L’ouvrage ne sera finalement publié qu’en novembre 1923, dans Clair de terre. Le dessin semble ainsi suggérer, de manière symbolique, l’articulation espérée entre engagement social et dynamique proprement surréaliste (Cahiers Desnos, ns n°9, p.80).

Élève bordelais isolé et en révolte contre les conventions familiales, Carrive découvre à l’âge de 18 ans la revue Littérature et cherche, par le biais d’André Breton, à s’agréger au cercle d’avant-garde parisien. Méfiant à l’égard de ce correspondant prolixe, Breton délègue souvent à Desnos le soin de lui répondre. Entre les deux jeunes hommes s’instaure alors un échange d’une liberté et d’une virulence singulières, où la provocation et le goût de la subversion littéraire tiennent lieu de manifeste implicite.
Carrive figure parmi les dix-neuf noms mentionnés dans le Manifeste du surréalisme (1924) comme ayant « fait acte de surréalisme absolu ». Il contribue au douzième et dernier numéro de La Révolution surréaliste en 1929, avant de progressivement se détacher du mouvement à la fin des années 1920. André Breton finit par lui régler son compte, parmi d’autres, dans le Second Manifeste du surréalisme (1930) : « M. Carrive, incapable d’envisager le problème politique ou sexuel autrement que sous l’angle du terrorisme gascon, pauvre apologiste en fin de compte du Garine de M. Malraux. »

Provenance :
Jean Carrive
Puis Charlotte Behrendt, épouse Carrive (1909-2002)
Bibliothèque surréaliste de Jean Carrive, Tajan, 17 nov. 2016, n°416, (succession Charlotte Carrive)

Bibliographie :
L’Étoile de mer, Cahiers Robert Desnos – 1923, ns n°9, 2020, p.79-80 (transcription fautive sur deux mots)

Prenez une longueur d’avance

Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir nos nouveautés et annonces importantes.

En vous abonnant, vous acceptez notre politique de confidentialité. Désabonnez-vous à tout moment.