BRETON, André (1896-1966)
Tapuscrit signé « André Breton »
Paris, 19 avril 1966, 3 p. in-4°
« Aujourd’hui, la liberté a moins besoin de défenseurs que d’inventeurs »
Fiche descriptive
BRETON, André (1896-1966)
Tapuscrit signé « André Breton »
Paris, 19 avril 1966, 3 p. in-4°
Le tout agrafé au coin supérieur gauche
Parfait état de conservation
L’une des dernières prises de position d’André Breton, affirmant son refus d’une récupération politique de l’art et sa fidélité à l’idéal révolutionnaire de liberté créatrice
Provenant de la collection Paul Destribats
« Des organisations, des groupes, qui se recommandent en général de la pensée trotskiste, ont au cours des derniers mois proposé la reconstitution d’une FIARI […] La multiplication de telles démarches nous conduit à prendre ouvertement parti. » […] « En cinq ans d’histoire, le nazisme s’est installé à Berlin, Franco à Madrid, la vieille garde bolchévique a été liquidée à Moscou. […] Le manifeste constitutif de la FIARI déclare que cette cause est celle de tout artiste révolutionnaire. » […] « Depuis lors, la guerre, d’abord ; et il a bien fallu que le feu se cache sous la cendre. Aujourd’hui, comment méconnaître le bouleversement de la situation ? […] Les artistes sont invités à faire œuvre de contestation par les puissances d’argent elles-mêmes. » […]
« Une fédération d’artistes révolutionnaires, aujourd’hui privée des objectifs de grande ampleur que visait la FIARI, ne saurait mieux faire que ce qui se fait sans elle, quand il s’agit de dénoncer par exemple les séquelles du stalinisme. […] L’indépendance de l’artiste […] mesure clairement la volonté révolutionnaire de chacun. » […] « Aujourd’hui, la liberté a moins besoin de défenseurs que d’inventeurs. »
Signé par André Breton aux côtés de Philippe Audoin, Vincent Bounoure, Gérard Legrand, José Pierre et Jean Schuster, ce document aux allures de manifeste répond à des appels trotskistes visant à reconstituer une Fédération Internationale de l’Art Révolutionnaire Indépendant (FIARI). Breton et ses compagnons rejettent cette initiative, estimant que le contexte historique de 1966 — marqué par la coexistence pacifique et le désenchantement idéologique — ne permet plus de renouer avec les conditions révolutionnaires des années 1930. Le texte dénonce à la fois le conformisme artistique de l’Est et de l’Ouest et la récupération bourgeoise des avant-gardes. Pour Breton, l’art doit demeurer indépendant de toute tutelle politique, sans renoncer à sa dimension subversive : la liberté artistique est moins affaire de défense que d’invention. Ce document, parmi les derniers qu’il signe avant sa mort (en septembre 1966), incarne la fidélité ultime du chef de file du surréalisme à une éthique de l’insoumission et à la primauté de la création sur l’idéologie.
Provenance :
Paul Destribats – Une Bibliothèque des avant-gardes (partie V), Christie’s, nov. 2022, n°231