GAINSBOURG, Serge (1928-1991)
Manuscrit autographe
S.l.n.d. [Paris, 1990], 3 p. in-4°
« Oh j’aimerais tant / Me noyer dans l’étang / Comme Ophélie / Oublier le temps / Me laisser glisser sans / Penser l’oubli »
Fiche descriptive
GAINSBOURG, Serge (1928-1991)
Manuscrit autographe en premier jet avec de nombreuses variantes inédites
S.l.n.d. [Paris, début 1990], 3 p. in-4° sur papier filigrané, chacune d’elles foliotée par Gainsbourg
Une page supplémentaire de la main de Gainsbourg pour l’élaboration des couplets et des refrains
Deux feuillets complètent ce manuscrit avec une mise au propre (de la main de Franck Langolff ?)
Gainsbourg remixe Rimbaud
Manuscrit complet et en premier jet de Ophélie, cinquième titre de l’album Variations sur le même t’aime, interprété par Vanessa Paradis
« Oh j’aimerais tant
Me noyer dans l’étang
Comme Ophélie
Oublier le temps
Me laisser glisser sans
Penser l’oubli
Laisser ce goût de cendres
Refroidies et descendre dans la nuit
Les méandres inconnus
De l’amour qui s’enfuit
Mais j’aimerais l’inconnu de l’imprévu
Moi j’aimerais tant
Que tu m’aimes autant
Jour et nuit
Que la [belle] Ophélie
Dérivant tombée des nues
Frôler les nénuphars
[Toutes les plantes rares]
Comme [la blanche]
Ophélie… Ophélie
Des traces de cent
pour cent c’est là le sang
Comme celui d’Ophélie
Se ronger les sangs
À quoi bon les san-
glots dans l’ennui
J’aimerais tant
Que tu m’aimes autant
Que je t’aime moi-même et le temps
[Qui] de temps en temps
Efface le présent
Pour être plus sur
[Du passé] du futur »
Fruit d’une audacieuse collaboration entre Vanessa Paradis (chant), Serge Gainsbourg (paroles) et Franck Langolff (musique), l’album Variations sur le même t’aime est enregistré entre février et avril 1990 dans les Studios Guillaume Tell à Paris. Dans une interview au journal télévisé de TF1 du 27 mai, Gainsbourg explique avoir « craché les lyrics en huit jours, c’est pour ça que je dis Paradis c’est l’Enfer, mais c’était infernal, j’ai failli en crever ». Sorti le 28 mai 1990, l’album est un immense succès. Certifié disque d’or et de platine, il s’écoule à 400.000 exemplaires. Gainsbourg s’éteint neuf mois plus tard.
Un ultime hommage à Rimbaud :
Gainsbourg n’a jamais caché sa fascination pour le natif de Charleville-Mézières. De même que la poésie de Baudelaire ou de Verlaine, les textes de Rimbaud ont de tout temps infusé dans l’imaginaire du chanteur-compositeur. Ainsi l’exprime-t-il dans ses pensées : « Je vais essayer de rejoindre Rimbaud, je veux l’approcher… Un jour je le retrouverai, quelque part en Abyssinie, où il faisait le trafic des armes et de l’or… ».
Dans ce cinquième titre de l’opus, l’Ophélie de Rimbaud se profile aisément en filigrane. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que Gainsbourg éprouve le thème du personnage de Hamlet. On se souvient de sa chanson La Noyée qu’il ne chantera qu’une seule fois, le 4 novembre 1972, dans l’émission « Samedi Loisirs ».
Ici, les très nombreuses ratures et corrections témoignent d’une recherche des mots qui, indéniablement, n’a pas été ici aussi fluide que pour les autres titres de l’album. Gainsbourg hésite, se reprend, cherche la bonne sonorité. Si le défi est de taille, son pastiche de l’Ophélie de Rimbaud se révèle être un parangon de la réécriture, caractéristique de ses textes les plus iconiques composés en hommage à ses idoles maudites.