BAUDELAIRE, Charles (1821-1867)

Lettre autographe signée « Charles » à sa mère, Madame Aupick
[Paris], « mercredi » [28 octobre 1863], 1 p. in-8°

« Michel a donc traité la question comme on traiterait de la vente d’un fonds d’épicerie »

EUR 4.200,-
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Fiche descriptive

BAUDELAIRE, Charles (1821-1867)

Lettre autographe signée « Charles » à sa mère, Madame Aupick
[Paris], « mercredi » [28 octobre 1863], 1 p. in-8°
Petite réparation au papier Japon en marge inférieure, sans atteinte au texte
Un mot caviardé de la main de Baudelaire

Baudelaire annonce à sa mère, non sans amertume, la cession de ses droits pour la traduction complète des Œuvres d’Edgar Poe auprès de son éditeur Michel Lévy

PROVENANT DES COLLECTIONS GODOY ET LABARTHE


« Ma chère mère,
J’espérais une lettre de toi ce matin. Ce voyage s’est-il effectué sans ennuis et sans accident, et surtout comment te portes-tu ?
[Madame Aupick avait rendu visite à son fils à Paris durant le mois d’octobre]
Oui, l’affaire Lévy est vidée. J’abandonne demain tous mes droits à venir pour une somme de 2000 francs payables dans une dizaine de jours. Ce n’est même pas la moitié de ce qu’il me faut. Il faut donc que la Belgique paie le reste. Je vais écrire en Belgique pour un traité (car je me défie des Belges), un traité disant le prix de chaque leçon, combien de leçons en tout, et combien de leçons par semaine.
Le Poe donnait (à moi) un revenu de 500
[francs] par an. Michel [Lévy] a donc traité la question comme on traiterait de la vente d’un fonds d’épicerie. Il paie simplement quatre années du produit. Je t’embrasse. Écris-moi.
Charles »


Le contrat sera acté entre Charles Baudelaire et Michel Lévy frères trois jours plus tard, le 1er novembre 1863 (qui tomba un dimanche, sans doute pour faciliter les comptes).
La cession de tous ses droits à Lévy comprend : Histoires extraordinaires ; Nouvelles Histoires extraordinaires ; Aventures d’Arthur Gordon Pym ; Eureka (non encore publié) ; Histoires grotesques et sérieuses (non encore publié)
L’éditeur profite, au travers de clauses léonines, de la situation financière exsangue dans laquelle se trouve le poète, toujours plus acculé de dettes. Dans une autre lettre à sa mère du 25 novembre, Baudelaire admet par ailleurs que Lévy « s’est engagé à partager cet argent entre quelques-uns de [ses] créanciers ». Ce traité est d’autant plus terrible pour lui que de tous ses ouvrages publiés de son vivant, seules les traductions de Poe connurent un succès en librairie.
Les « leçons » évoquées ici par le poète seront en réalité des conférences qu’il donnera l’année suivante, quand il sera fixé à Bruxelles. Il en prononcera au total cinq, en espérant attirer l’attention d’Albert Lacroix (1834-1903), l’éditeur des Misérables. Elles ne rencontreront pas le succès escompté.

Provenance :
Collection Armand Godoy (Drouot, 12 oct. 1988, n°203)
Puis collection André Sylvain Labarthe

Bibliographie :
Charles Baudelaire, dernières lettres inédites à sa mère, éd. J. Crépet, Excelsior, 1926, p. 177-178 – Correspondance générale, éd. J. Crépet, Lambert successeurs, 1947-1953, n°794, Correspondance, t. II, éd. Claude Pichois, Pléiade, p. 327-328