FLAUBERT, Gustave (1821-1880)

Lettre autographe signée « ton Gve Flaubert » à Maxime Du Camp
[Paris, 13 octobre 1869], 2 p. in-8° sur vergé beige, à l’encre noire

« Encore un de parti ! La petite bande diminue ! Les rares naufragés du radeau de la Méduse disparaissent ! »

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Fiche descriptive

FLAUBERT, Gustave (1821-1880)

Lettre autographe signée « ton Gve Flaubert » à Maxime Du Camp
[Paris, 13 octobre 1869], 2 p. in-8° sur vergé beige, à l’encre noire
Infime déchirure au coin supérieur droit du second feuillet, sans atteinte au texte

Flaubert annonce la mort de Sainte-Beuve, survenue le jour même

La plus importante des onze lettres de Flaubert à Du Camp encore en mains privées


« Sainte-Beuve est mort tantôt à 1 heure et demie sonnant. Je suis arrivé chez lui, par hasard, à 1 h. 35.
Encore un de parti ! La petite bande diminue ! Les rares naufragés du radeau de la Méduse disparaissent !
Avec qui causer de littérature, maintenant ? Celui-là l’aimait. Et bien que ce ne fût pas précisément un ami, sa mort m’afflige profondément. Tout ce qui, en France, tient une plume, fait en lui une perte irréparable.

Ton vieux Caraphon¹ n’est pas gai !

J’ai, à propos d’Aïssé, des embêtements graves. Latour-Saint-Ybars² surgit avec un traité et force l’Odéon à le jouer avant la mère Sand³. Or, comme Le Bâtard fait de l’argent, et que L’Affranchi ne sera pas représenté avant le commencement de décembre, cela rejette Aïssé je ne sais quand. Rien n’est encore absolument décidé. Mais je suis contrarié à cause du petit Philippe.
Le retard de la pièce entraîne celui du volume de vers
, etc., etc. Quoique je n’aie rien à te dire, j’éprouve un besoin démesuré de te voir et d’embrasser mon vieux Max.

Amitiés au Major ; tendresses au Mouton⁸.
Ton Gve Flaubert
Rue Murillo, 4, parc Monceau. »


[1] Maxime Du Camp avait ainsi surnommé Flaubert durant leur voyage en Orient
[2] Isidor Latour, dit Latour-Saint-Ybars, fera jouer sa pièce L’Affranchi au théâtre de l’Odéon du 19 au 27 janvier 1870.
[3] Allusion à la pièce L’Autre de George Sand, dont la création a lieu au théâtre de l’Odéon le 25 février 1870.
[4] Le Bâtard, comédie en 4 actes d’Alfred Touroude, créé au théâtre de l’Odéon le 18 septembre 1869.
[5] Mademoiselle Aïssé, drame en cinq actes de Louis Bouilhet, sera finalement joué au théâtre de l’Odéon le 6 janvier 1872.
[6] Philippe Leparfait, fils adoptif et héritier de Louis Bouilhet.
[7] Dernières chanson de Louis Bouilhet, recueil de poésies posthumes avec une préface de Flaubert, publié chez Michel Lévy en 1872.
[8] « Major » (Émile Husson) et « Mouton » (Adèle Husson), les grands amis de Maxime.

Flaubert eut de tout temps une haute considération pour Sainte-Beuve et ce, même au-delà des quelques réserves émises par le critique à la parution de Salammbô, sept ans plus tôt : « C’est donc un tour de force complet qu’il a prétendu faire, et il n’y a rien d’étonnant qu’il y ait, selon moi, échoué. » (Le Constitutionnel, 8-22 déc. 1862). Celui qu’il appelait révérencieusement « Maitre » devait être pour Flaubert sinon le dédicataire, l’un des lecteurs privilégiés de son prochain roman, comme il le confie le lendemain dans une lettre sa nièce Caroline : « J’avais fait L’Éducation sentimentale, en partie pour Sainte-Beuve. Il sera mort sans en connaître une ligne ! » (Corr., Pléiade, t. IV, p. 112-113).

On recense 38 lettres de Flaubert adressées à son ami Maxime Du Camp, dont 24 sont aujourd’hui à la Bibliothèque de l’Institut. Une copie de cette lettre, d’une main inconnue, figure dans le fonds Lovenjoul (A.V, f°308).

Provenance :
Collection particulière

Bibliographie :
Œuvres complètes
, éd. L. Conard, Paris, t. IV, p. 77-78
Correspondance, éd. R. Descharmes, Le Centenaire, t. III, n.I, p. 223 [« autographe non retrouvé »]
Correspondance, éd. Jean Bruneau, Pléiade, t. IV, p. 111