GIONO, Jean (1895-1970)

Lettre autographe signée « Jean Giono » au rédacteur en chef de la revue Carrefour
[Manosque], le 4 octobre 1948, 2 pages in-8

« Non pas que je crois à l’excellence supérieure de ce que j’écris »

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Fiche descriptive

GIONO, Jean (1895-1970)

Lettre autographe signée « Jean Giono » au rédacteur en chef de la revue Carrefour
[Manosque], le 4 octobre 1948
2 pages in-8

Longue lettre de Giono à propos de Le Hussard sur le toit et Mort d’un personnage


« Cher Monsieur,
La lettre de M. Muller n’a pas eu de réponse parce qu’elle est arrivée ici pendant mes vacances. Je l’ai trouvée avec le reste de mon courrier il y a peu de jours. Il n’y a eu, à ma connaissance, qu’une seule lettre de Monsieur Muller. Le « Hussard sur le toit » n’est qu’un extrait d’un livre plus long, impossible à publier entièrement en revue ou en hebdomadaire et M. Muller m’avait déjà indiqué qu’il ne s’agissait pas d’extraits pour Carrefour. Pour l’instant je n’ai rien à publier et je le regrette car j’estime qu’un publication dans votre journal me ferait beaucoup d’honneur. Si vous désirez attendre que j’ai un texte pour vous, je vous en remercie; si vous désirez que je vous rembourse l’avance que vous avez eu la gentillesse de me faire je vous adresserai un chèque de cette somme aussitôt. De tout façon, il faut bien se souvenir que cette somme m’a été adressée à un moment ou Mr Muller avait accepté, et je lui avais adressé, un texte de moi intitulé Mort d’un Personnage.
J’étais loin de m’attendre à me le voir retourner plusieurs mois après. Non pas que je crois à l’excellence supérieure de ce que j’écris mais simplement parce qu’après plusieurs mois je croyais la publication décidée. Toutefois j’ai trouvé le rejet fort naturel. Ce n’était pas un texte d’action et croyez bien que j’en ai gardé aucune rancœur (il a été publié dans la Revue de Paris) je n’en parle que pour fixer les conditions dans lesquelles les 30.000f m’ont été adressés, et pour bien spécifier que je ne les ai pas réclamés sans contrepartie. Ils sont à votre disposition si vous ne voulez pas attendre; si vous le pouvez, je vous enverrai mon premier texte libre. Et je reste, croyez moi, votre débiteur d’amitié.
Jean Giono
PS :Excusez moi auprès de Muller »


Nous joignons: Une seconde lettre autographe signée de Jean Giono, 1 page in-8, également du 4 octobre 1948, relative à un erratum concernant les 30.000F lui ayant été versés.


L’après-guerre est une époque compliquée pour Jean Giono. En effet, il est accusé de collaboration par le comité de libération de Manosque en septembre 1944 et passe cinq mois en prison. Grasset, également accusé de collaboration, voit mettre sous séquestre sa maison d’édition à la Libération. Les relations entre Giono et Grasset deviennent alors exécrables. Dans le même temps, Henri Muller, qui a été secrétaire général de Grasset jusqu’en 1944, est en contact régulier avec Giono et est édité à la fois par Grasset et Gallimard. En 1948, il dirige les pages littéraires de Carrefour. Le destinataire de ces lettres est sans aucun doute le rédacteur en chef de l’hebdomadaire en question, revue tendance gaulliste créée à la Libération, qui vire plus tard vers l’extrême droite.