JACOB, Max (1876-1944)

Lettre autographe signée « Max Jacob » à Pierre Lagarde
St Benoît [sur Loire], le 23 janvier [19]40, 1 p. in-4° avec enveloppe

« Je souffre à en pleurer et je prie très spécialement pour toi »

EUR 550,-
Ajouter à la sélection
Fiche descriptive

JACOB, Max (1876-1944)

Lettre autographe signée « Max Jacob » à Pierre Lagarde
« Saint Raymond de Peñafort », St Benoît [sur Loire], le 23 janvier [19]40, 1 p. in-4° avec enveloppe autographe oblitérée [23-1-40]
Traces de pliures dues à la mise sous pli, petits trous d’agrafe au coin supérieur gauche sans atteinte au texte

Depuis Saint-Benoît-sur-Loire où il mène une vie monacale, le poète livre un témoignage d’affection aux élans christiques à son ami Pierre Lagarde, mobilisé au front contre l’armée allemande


« La beauté est un des pièges du diable. Je ne dis pas qu’il faille être une brute pour être un chrétien… mais j’y pense ! […] Le renouement à la beauté est un des renoncements. Il ne peut pas s’arrêter à la beauté si on veut faire des progrès dans la voie du Paradis. Les paradis terrestres ont mené Adam et Eve à la faute qui nous vaut la terre actuelle ; il faut donc renouer aux Paradis terrestres et la beauté est un paradis terrestre. […]
Les médiations sont propres à inspirer les sentiments nécessaires : l’émerveillement, l’humilité, la reconnaissance, le repentir, l’idée de la mort, la crainte du Jugement Dernier, la peur salutaire de l’enfer, l’espérance du Paradis, la résolution dans la direction d’une vie exemplaire.
Je souffre avec vous tous, mes amis et tous mes fils du front et des casernes, je souffre à en pleurer et je prie très spécialement pour toi […] Dieu voit chacun de vos gestes, écoute le bruit de chacune de nos pensées, pèse chacune de nos souffrances.
Je n’ose parler de mes malaises devant tant de douleurs mais moi aussi je suis assez mal sans savoir ce que j’ai.
Je t’embrasse
Max Jacob »


Figure centrale de l’avant-garde montmartroise et montparnassienne, converti en 1915 au catholicisme après avoir eu plusieurs visions, Max Jacob quitte Paris en 1936 pour s’installer à Saint-Benoît-sur-Loire dans le Loiret. Il y mène une vie monacale. Ses travaux poétiques et médiations, en partie reprises par Pierre Lagarde dans son admirable ouvrage Max Jacob – Mystique et martyr (La Baudinière, 1944), se rapprochent du courant quiétiste. Il assume dès lors sa vie de pêcheur comme condition de sa rédemption. Ses origines juives lui valent, six mois avant la libération de Paris, d’être arrêté par la Gestapo, destin qu’il accepte comme un martyr. Il est interné par la gendarmerie française au camp de Drancy et y meurt cinq jours plus tard, quelques heures avant sa déportation programmée pour Auschwitz.

Provenance :
Archives Pierre Lagarde
Puis collection particulière, Christie’s, 14 déc. 2023, n°109

Lettre inédite