LAMARTINE (de), Alphonse (1790-1869)

Lettre autographe signée « Al. de Lamartine » à Stéphanie de Virieu
Paris, 14 avril 1841, 3 p. 1/2 in-8° sur papier vergé

« N’était-il pas aussi mon frère, et plus que bien des frères »

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Fiche descriptive

LAMARTINE (de), Alphonse (1790-1869)

Lettre autographe signée « Al. de Lamartine » [minute] à Stéphanie de Virieu
Paris, 14 avril 1841, 3 p. 1/2 in-8° sur papier vergé

Lamartine pleure la mort de son ami d’enfance Aymon de Virieu


« Hélas ! Je savais notre perte affreuse depuis deux jours. Que puis-je vous dire que vous n’ayez pas présumé de moi, en le sentant par vous-même ? N’était-il pas aussi mon frère, et plus que bien des frères. Je perds en lui autant que vous-même, tout le passé, tout ce qui me restait d’affection, de jeunesse dans ma vie. Je n’ai plus d’ami que dans mes souvenirs et dans le ciel.
Ce que M. de Miramon [beau-frère de Virieu] et vous me dites de ses derniers moments est consolant pour ceux qui croient fermement comme nous à la réunion dans l’éternité. Mourir avec cette pensée rendue sensible et présente dans la prière et dans une foi ce n’est presque pas mourir, ce n’est que partir le premier. Il l’a eue, et j’en suis heureux comme vous. C’est aussi cette pensée qui nous soutiendra dans notre reste de chemin bien morne et bien solitaire.
Quand Mme de Virieu pourra entendre un mot venant du dehors, je vous prierai de lui parler de moi et de mon dévouement absolu aux souvenirs, aux désirs, aux affection que notre ami a laissés autour d’elle et en elle sur cette terre. Mon seul bonheur sera de lui témoigner en eux qu’il a un frère ici-bas.
Adieu, Mademoiselle. Vous avez été longtemps le témoin d’une amitié qui ne finit pas par la mort de l’un des deux amis, soyez assez bonne pour ne pas en laisser effacer en vous toutes les traces et pour permettre que je les retrouve toujours dans le cœur et quelques fois dans le souvenir des deux personnes qu’il aima le plus, Mme de Virieu et vous.
Al. de Lamartine »


S’étant rencontrés dès l’enfance, Aymon de Virieu (1788-1841) a sans doute été l’ami préféré de Lamartine. Cette affection fut exprimée par le poète romantique dans plusieurs lettres : en 1808 « je t’aime de toute mon âme et je suis pour la vie ton plus tendre et sincère ami », en 1839-1940 « Tout m’est indifférent, excepté nous » ; « Je t’aime de plus en plus à mesure que le vide se fait autour du cœur ».
La mort brutale de son ami, survenue le 7 avril, bouleversa l’écrivain. Virieu, qui depuis toujours avait reconnu en Lamartine l’un des génies du romantisme, était son confident. Le poète lui livrait ses pensées, ses ambitions et lui demandait son avis pour des décisions essentielles ou ses essais littéraires.
Lamartine ne s’épancha que très peu sur la disparition de son ami, hormis dans la présente lettre, seul témoignage sans détour de sa tristesse.
La présente lettre fut conservée par Lamartine pour ses archives. On connait la lettre envoyée à Stéphanie de Virieu (dont l’adresse de la destinataire et le cachet postal figurent sur la quatrième page) publiée dans la correspondance générale. Il n’y a pas de variante entre les deux textes.

Bibliographie :
Correspondance Lamartine – Virieu, t. IV, éd. Marie-Renée Morin, Presses Univ. de France, n°318
Correspondance générale – t. III, éd. Christian Croisille, Honoré Champion, n°41-32
Lamartine et ses amis, Martine Dupeuple, Vu. Gf 17 oct. 2018