PIAF, Édith (1915-1963)

Lettre autographe signée « Eydith » à Yves Montand
« Nevers, le 16 mai 1945 à midi vingt trois minutes », 2 p. 1/2 in-8°

« Je t’aime à en crever »

EUR 3.800,-
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Fiche descriptive

PIAF, Édith (1915-1963)

Lettre autographe signée « Eydith » à Yves Montand
« Nevers, le 16 mai 1945 à midi vingt trois minutes », 2 p. 1/2 in-8° sur papier d’écolier bruni
Déchirure au pli central et en marge supérieure
[Pour une lecture plus aisée, nous avons transcrit la lettre avec une orthographe juste]

Déclarations enflammées à son amant Yves Montand, aux premières semaines de leur relation, et quelques jours seulement après la victoire des Alliés


« Mon tout petit à moi si grand. C’est odieusement triste, j’ai envie de pleurer à chaque seconde, chéri, mon chéri, oh il faut que tu me viennes, je n’en peux plus, je t’aime à en crever. Ce train qui est parti avec moi sans toi, quel salaud m’amour, mon grand, ma vie ! Je n’ai pas le courage de te parler d’autre chose que NOUS ! Tout ce que je sais, tout ce qui bourdonne dans ma tête au ton d’un chant intense, c’est qu’il y a toi toi toi toi toi. Quel cafard, quel truc moche que notre séparation, quelle connerie surtout. Et toi ? Comment es-tu ? Comment peux-tu vivre ? Dis comment ? Oh ma gueule chérie, mon tout petit à moi ! Tes mains, tes belles mains, que j’aime ta peau, ta belle gueule, tes beaux cheveux où j’ai envie de plonger mes lèvres jusqu’à étouffer, jusqu’à ne plus avoir qu’une force, c’est… de te dire ton nom, Yves mon bel Yves mon doux Yves, mon petit salaud d’Yves. Mon adoré d’Yves, Yves, Yves, Yves. Que fais-tu ? As-tu dormi ?????? Moi non, j’ai cherché ton corps partout, ta peau me manque, j’ai besoin de tes mains, de ton rire, de ta voix, enfin de toi ! Sois sage hein ? Ne vois pas trop Guiguitte [Marguerite Monnot] ? Et puis les autres. Tâche d’être bien, foutu d’être comme tu l’as toujours été, digne de notre amour, sois nous ! Tu sais je ne tiendrai pas le coup, il faudrait venir me rejoindre, je t’enverrai l’itinéraire demain et il faudra que tu viennes, tes chemises, ta radio, tes chansons, après, tu feras tout ça en juin, moi je te veux, je t’aime, et c’est tout ce qui compte pour moi. Nevers est triste à mourir, aussi triste que mon cœur, c’est pas pour dire hein ? Les rues sont conventionnelles, on dirait qu’on les a faites exprès pour moi, elles sont comme toutes les rues de province, sans originalité, pleines de gens bêtes et insignifiants, enfin bref, très comme tu le penses. Il y a un gars qui part pour Paris et je lui donne ma lettre, tu auras de mes nouvelles demain, mais je suis obligée de te quitter car le gars s’en va et il attend ma lettre. Au revoir ma douce joie de vivre, enfin mon moi pour toi.
Eydith [la chanteuse joint la première lettre de son prénom et celle de son amant pour signer sa lettre]

JE T’AIME »


Piaf et Montand se rencontrent en 1945, sur le tournage du film Étoile sans lumière. Elle a 30 ans et lui 24. Si Piaf est déjà une immense célébrité, Montand n’en est qu’au début et lui devra beaucoup. Selon sa folle générosité, elle le couvre de cadeaux, mais aussi de chansons qu’elle écrit pour lui. Elle lui fait rencontrer tout ce que Paris compte de notoriétés, dont Cocteau. À l’image de cette lettre, les premières semaines de leur relation sont les plus passionnées. Très éprise de son jeune amant, Édith supporte très mal son absence. Alors qu’elle se trouve en tournée en province, certains traits de son caractère éruptif transparaissent, tels la jalousie, la possessivité et l’impatience.
Elle termine son épître par un très graphique « Je t’aime » en grandes lettres.

Magnifique lettre

Provenance :
Succession Montand-Signoret
Digard Auction, 26 juin 2017, n°59