VOLTAIRE, François-Marie Arouet, dit (1694-1778)
Lettre autographe signée « de Voltaire » à George-Conrad Walther
Château de Lunéville, 6 avril 1748, 3 p. in-8°
« Pardonnez à un homme amy de la paix cette chaleur qu’il met à la conserver, et cette crainte qu’il a de voir son ouvrage détruit »
Fiche descriptive
VOLTAIRE, François-Marie Arouet, dit (1694-1778)
Lettre autographe signée « de Voltaire » [à George-Conrad Walther]
Château de Lunéville [dans l’actuel département de Meurthe-et-Moselle], 6 avril 1748, 3 p. in-8°
Traces de pliures dues à l’envoi d’époque, quelques rousseurs et salissures
Voltaire prépare depuis Lunéville la première publication de ses Œuvres chez l’éditeur Walther
« J’ay reçu l’honneur de votre lettre qui a croisé la dernière que je vous adressay de Lunéville. Il ne me reste que vous faire des excuses de l’empressement que j’ay eu à vous représenter des engagements que vous êtes disposé à remplir avec tant d’exactitude. Pardonnez à un homme amy de la paix cette chaleur qu’il met à la conserver, et cette crainte qu’il a de voir son ouvrage détruit. Je compte absolument monsieur sur votre parole, et quand même vous ne pouriez à Pâques donner que la moitié de la somme stipulée, vous trouverez auprès des contractans touttes les facilitez que méritent votre probité et votre envie sincère de vous acquiter. Je ne doute pas qu’en ce cas l’autre moitié ne suivît bientôt et je me flatte même que vous pourrez donner le tout à Pâques, afin de vous débarasser entièrement de cette malheureuse affaire qi troubloit si cruellement deux maisons respectables. Je ne cesseray de me croire très heureux d’avoir contribué à cet accomodement malgré les difficultez qui m’ont toujours traversé, et je me flatte que j’ay acquis par là quelque droit à votre estime et à votre affection. Si je peux obtenir de vous ces sentiments, ils ajouteront à la joye que me donne votre conciliation. Vous pouvez monsieur d’adresser, tous les papiers, billets de change, ou les pouvoirs que vous jugerez à propos. Je n’abuseray pas de votre confiance, je mettray tout en règle, je vous enverray les quittances et décharges valables. Tout sera fait dans le meilleur ordre.
Ayez seulement la bonté d’adresser vos paquets sous l’enveloppe de Mr de la Reinière fermier général des Postes de France à Paris. Pour plus de sûreté et de diligence, j’adresse cette lettre par la même raison à l’intendant de votre armée en Flandres.
J’ay l’honneur d’être avec le zèle le plus inviolable
Monsieur
Votre très humble et très obéissant serviteur
de Voltaire »
C’est à la demande de Voltaire que George Conrad Walther, imprimeur royal à Dresde, s’engage dans l’impression des oeuvres toujours renouvelées, augmentées et corrigées du philosophe en exil. Les Œuvres de M. de Voltaire Nouvelle édition revue, corrigée et considérablement augmentée par l’Auteur parut entre 1748 et 1754 en huit volumes sort des presses de Breitkopf, à Leipzig, l’imprimeur de Walther ; une deuxième édition Walther parut en 1752, portant les dernières corrections de Voltaire.
Voltaire publie la même année Zadig, son premier conte philosophique qui traite de la destinée humaine, du bonheur et du destin. Il est peu apprécié du couple royal. Déçu, désabusé, il se retire un an, avec Emilie du Châtelet, à la cour du roi de Pologne Stanislas, à Lunéville, d’où cette lettre est envoyée.