[NERVAL] VILMORIN, Louise de (1902-1969)

Manuscrit autographe signé « Louise de Vilmorin » adressé à l’éditeur Mazenod
S.l [Paris], 14 juin 1952, 2 p. 1/2 in-4

« Les tristes et merveilleux récits de Gérard de Nerval sont l’œuvre d’un explorateur du chagrin »

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Fiche descriptive

[NERVAL] VILMORIN, Louise de (1902-1969)

Manuscrit autographe signé « Louise de Vilmorin » adressé à l’éditeur Mazenod
S.l [Hôpital Américain, Neuilly-sur-Seine], 14 juin 1952, 2 p. 1/2 in-4
Petites pliures marginales, quelques petites rousseurs et taches

Exceptionnel manuscrit de Louise de Vilmorin sur Gérard de Nerval, sans doute la dernière version d’étape d’un texte majeur dans l’œuvre de la femme de lettres. À notre connaissance, ce texte n’a pas été publié par l’éditeur Mazenod.


Nous n’en transcrivons ici que quelques fragments :

« Le souvenir de mes belles cousines, ces intrépides chasseresses que je promenais dans les bois – belles toutes deux comme les filles de Léda, m’éblouit encore et m’enivre. Pourtant je n’aimais qu’elle alors. Les paumes de Gérard de Nerval, qu’il appuie tantôt sur son front ou ses yeux et tantôt contre sa poitrine sont imprégné de ce parfum qui nous vient des distances et que nous respirons parfois au lendemain d’un beau jour quand l’imagination, envahie par un soupçon d’amour, fonde un temps sans limite sur les délices d’un moment. […] Je traversais un soir les bosquets de Clarens, perdu au nord de Paris dans les brumes, lorsque j’aperçu un homme debout, immobile et penché au milieu d’une eau mouvante et légèrement surélevée […] Des formes, des ombres blanches, des silhouettes, des paysages et même des moments, modelés par le vent, se dégagèrent peu à peu de ce remue-ménage et s’ordonnèrent en un cortège qui défila devant moi à la suite des deux promeneurs que je ne voyais plus. C’était le cortège des regrets et des obsessions fidèles au plus fidèle des hommes […] Bruyères et digitales pourprées, colonnades et clair feuillage, Aurélie en amazone avec ses cheveux blonds flottants, se promenait dans un bois de peupliers, d’acacias et de pins qui bougeaient avec elle […] Les tristes et merveilleux récits de Gérard de Nerval sont l’œuvre d’un explorateur du chagrin […]
Louise de Vilmorin »


Ce manuscrit était destiné à l’Anthologie des écrivains, préparée par les éditions Mazenod. Ce texte sensible exprime l’attachement de Louise de Vilmorin à Gérard de Nerval, écrivain romantique notamment célèbre pour ses nouvelles écrites pour se purger de sa folie, notamment Pandora (1853) et Aurélia (1855). Le début de la lettre reprend quelques phrases la première. Cet éloge de Gérard de Nerval est aussi un récit de rêve, trope que l’on retrouve parfois dans les textes intimes ou poétiques de Louise de Vilmorin. L’esprit onirique qui se dégage de l’œuvre de Nerval entre en résonance avec le beau poème de Louise intitulé « Le Voyageur en noir ».

Le texte : Il existe une version presque identique de ce texte que les héritiers de l’auteur ont déposé à la bibliothèque Doucet, où il est répertorié sous le titre « Le souvenir de mes belles cousines », sous la cote MsMs28893. La version de la bibliothèque Doucet est datée du 16 juin 1952. Postérieure de deux jours à ce manuscrit daté du 14 juin, elle est dédiée à Raymond Queneau et porte la mention en haut de page « Hôpital américain ». C’est lors de l’une de ses hospitalisations, en mai et en décembre 1952, où elle est soigéne à la suite d’opérations de la hanche, que Louise met au point ce texte.

Voir Louise de Vilmorin, Une vie de bohème par Geneviève Haroche-Bouzinac, Flammarion, 2019, [p. 153, 244, 278, 279, 422]
Nous remercions Geneviève Haroche-Bouzinac pour les éléments qu’elle nous a aimablement communiqués