BILLAUD-VARENNE, Jacques-Nicolas (1756-1819)

Lettre autographe signée « Billaud-Varenne » à ses collègues
Sainte-Ménehould, 16 septembre 1792, 3 p. 1/2 in-4°

« Les hommes du dix aoust ne fuiront pas devant les prussiens, ils ont trop envie de se mesurer avec eux »

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Fiche descriptive

BILLAUD-VARENNE, Jacques-Nicolas (1756-1819)

Lettre autographe signée « Billaud-Varenne » à ses collègues
Sainte-Ménehould, 16 septembre 1792, 3 p. 1/2 in-4° à en-tête de La Municipalité de Paris
Traces de pliures, réparation marginales, petite annotation d’une autre main sur le quatrième feuillet

Lettre historique aux tons de fanatisme de Billaud-Varenne à propos de la marche des armées républicaines, deux jours avant la cruciale bataille de Valmy, ayant eu pour conséquence directe l’abolition de la royauté


« Un petit accident arrivé hier, mes chers collègues, aussitôt que la lettre que je vous ai écrite a été partie, et que mal rendy, serait capable de répandre l’alarme et la consternation, m’oblige de vous écrire aujourd’hui ; pour vous instruire de la vérité et démentir tous les récits mensonger qu’on pourra faire. Vous saurez que dans notre retraite au camp de damartin, à 2 heures de Ste Menehoult, l’arrière garde de notre armée a été assez vigoureusement chargée mais le corps de l’armée s’était rendu au camps en bon ordre et était même déjà campé. Tout à coup des malveillants répandant l’allarme ont en annoncant que l’arrière garde a été entièrement raillée en pièces, et les ennemis marchant en force tombaient déjà sur le corps de l’armée ; et que tout était perdu. Les conducteurs des Barges en prenant les premiers l’épouvante, ont accru la terreur que cette nouvelle a répandue ; et dans un instant la confusion a été telle que cinq cent hommes auraient pu facilement mettre en déroute toute l’armée. Cependant le général est accouru au devant d’elle. Il a trouvé sa cavalerie dans le meilleur ordre, à savoir les fuyards se sont ralliés : Les bagages arrêtés, et la confusion dissipées. Tel sont les faits dans toute leur pureté. Le camps est réformé : Les fuyards éloignés arrêtés ; et il faut croire que cette leçon sera suffisante pour electriser et ne jamais leur permettre d’oublier qu’ils ont une tache d’infamie à laver dans le sang de l’ennemi. Suivant toutes les apparences les trois armées de MM. Dumouriez, Kelermann et Beurnonville vont se joindre demain. Aussitôt elle marcheront sur Châlons, cette place-ci n’étant pas tenable. Là avec des forces imposantes, nous ne craindrons plus l’ennemi ; et si pour nous éviter, il prenait la direction du côté de Reims ; alors il vous trouverait en tête ; et nous tombant sur ses derriere il n’en réchapperait pas un.
Faites donc vos dispositions en conséquence. Pressez les travaux du camps de Paris. Demandez à grands cris la masse des troupes de ligne qui se trouvent perdues dans les départements du midi. Hâtez autant que possible la marche des convois vers les points de réunion de nos troupes, et vous conserverez ce calme et cette énergie qui vous ont obtenu la victoire devant la Bastille et le château des Tuileries. Les hommes du dix aoust ne fuiront pas devant les prussiens ils ont trop envie de se mesurer avec eux. Adieu mes chers collegues, je pars pour le camp de Damartin où je compte retrouver des hommes dignes encore de la confiance de la nation.
Billaud Varenne »


Quatre jours avant cette lettre, l’armée de Brunswick (74000 hommes) franchit les défilés d’Argonne. Billaud-Varenne commence d’abord par évoquer la retraite de Châlons et la confusion jetée par des melveillants qui ont failli mettre l’armée en déroute. Les soldats ont donc « une tache d’infamie à laver dans le sang de l’ennemi ». Il évoque ensuite les armées de Dumouriez, Kelermann et Beurnonville, dont les deux premières seront décisives pour la bataille de Valmy deux jours plus tard. Avec une grande défiance envers l’ennemi, le conventionnel demande à grand cris le ralliement de toutes les troupes républicaines jusqu’à celles se trouvant « perdues dans les départements du midi ».
Billaud-Varenne fait partie des 24 commissaires désignés par la commune de Paris, après les 30 nommés par le conseil exécutif provisoire ; il partait en mission avec un passeport de la commune et une commission du conseil exécutif.

La bataille de Valmy, que cette lettre laisse entrevoir, est remporté par les troupes françaises de Dumouriez et Kellerman (44000 hommes) sur les armées prussiennes de Brunswick. Des volontaires de la garde nationale ont participé au combat aux côtés des soldats professionnels de l’armée royale. Prise à revers, l’armée de Brunswick bat en retraite et retrouve ses positions de départ le 23 octobre.
Le lendemain, une première réunion de la Convention nationale proclame l’abolition de la royauté et le Conseil exécutif constitué après le 10 août (chute de la monarchie après la prise des Tuileries) est maintenu.

Après le 10 août 1792, Billaud-Varenne est membre de la Commune de Paris. Nommé substitut du procureur Pierre Louis Manuel, il est témoin des massacres de septembre 1792, pendant lesquels il semble encourager les tueurs. Il se rend peu de temps après à Châlons avec le titre de commissaire de la Commune de Paris pour y surveiller les généraux suspects.