VERLAINE, Paul (1844-1896)

Epreuves corrigées de Bonheur par Paul Verlaine, enrichies d’une lettre autographe signée au sujet du recueil
[Léon VANIER] Paris, Léon Vanier, 1891, in-12°

« Farceur ! mes livres se vendent bien »

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Fiche descriptive

VERLAINE, Paul (1844-1896)

Epreuves corrigées de Bonheur par Paul Verlaine, enrichies d’une lettre autographe signée au sujet du recueil
[Léon VANIER] Paris, Léon Vanier, 1891, in-12, plein maroquin marron, dos à cinq nerfs tirés or, filets intérieurs, reliure postérieure (Canape, 1912), dos légèrement frotté
La couverture est titrée à l’aquarelle et porte les mentions du tirage
Une liste des œuvres poétiques de Verlaine à l’encre verte figure en regard de la page de titre.
Abondantes corrections autographes et indications pour l’imprimeur de la main de Verlaine.

Epreuves complètes et corrigées de la main de Verlaine pour son recueil Bonheur et enrichies d’une longue lettre autographe signée de ce dernier


La genèse de Bonheur nous est connue. L’idée en précède de beaucoup l’exécution, en effet, la notice des Hommes d’aujourd’hui rédigée dès le 20 novembre 1885 et à lui-même consacrée, Verlaine annonçait déjà le recueil et son intention de donner ainsi un « tryptique » catholique dont Sagesse et Amour forment les deux premiers volets.

Verlaine envoie dès le 23 mai 1887 cinq premiers poème à son éditeur Vanier : L’incroyable, l’unique horreur…, La vie est…, Après la chose faite…, Et, déjà très…. (qui deviendra la pièce VI : Puis, déjà très anciens), L’adultère, celui du moins

Constitué au total de trente-deux poèmes, le titre même du futur recueil, en 1890, n’est pas arrêté. Entre Bonheur et Espoir le poète hésite encore ; on ne peut douter toutefois qu’il tînt à Bonheur, et que ce soit sous ce titre que l’œuvre lui soit d’abord apparue, comme en témoignent les dernières lignes de Pauvre Lélian, dans les Poètes Maudits de 1888 : « Il écrit et va ou veut, ce qui est la même chose, vivre Beatitubo ».
Le manuscrit est porté à l’imprimeur Capiomont dès la fin janvier 1891. S’en suivent les épreuves corrigées que nous présentons ici, toujours adressées à Capiomont et reçues par ce dernier les 27 et 28 février 1891. Le recueil parait vraisemblablement fin avril ou début mai de la même année.

Nous joignons une longue lettre autographe signée de Paul Verlaine à son éditeur Léon Vanier du 23 janvier 1891 au sujet de la publication de Bonheur :

« Mon cher Vanier,
J’écris, en même temps qu’à vous, à [Albert] Savine.
Je lui dis, parmi les choses toutes particulières entre lui et moi (je retranscrits)
« Quant à Bonheur, parlons peu et parlons bien – et surtout franc.
« Voilà longtemps que complet,
« Ce livre aussi volumineux que
Sagesse, Maintenant, Vanier
« m’en offre 500 francs, tel qu’il est
« et vous voudriez le voir grossir,
« grossir sans cesse, oubliant que la
« quantité n’a
« jamais rien prouvé, surtout dans
« un volume de vers sérieux, des
« vers avec quoi on peut se permettre
« aussi bien, parlant généralement,
« des artifices typographiques, etc.
« et d’ailleurs, je le répète, Sagesse
« qui compte demeure
[un]
« livre important dans mes
« œuvres en contient pas plus de
« ‘matière’ que Bonheur tel
« que vous l’avez, 1400 et des
« veuillez, je vous en supplie
« m’écrire à propos de ce
« Bonheur là ? Que je sache sur
« quel pied véritablement
« danser…

C’est catégorique. Si pas de réponse, voici mon plan. D’abord consulter légistes. Envoyer manuscrit où il y a deux seules choses que je n’ais pas, pas les meilleurs, mais j’y viendrai ?
Puis publier avec un autre titre : Espoir
[…]
Je compte actuellement 640 vers à ajouter à vos 690, ce qui nous fait 1330 vers, plus deux choses en train presque finies, ce qui dépassera 1400.
J’ai tout recopié à votre usage, sauf une pièce facile à retrouver dans le n° de noël 1889 du Chat Noir, commençant par « La neige à travers la brume »
[…]
Je vais donc attendre la réponse de Savine et dès reçue, [vous] aurez mot mien. S’il tarde trop, [je] vous ferai signe et [nous] agirons de concert.
Voilà, je crois, bien parler. […]
Je n’ai rien reçu que 10 exemplaires de Sagesse et de Parallèlement […]
Quoi encore ? Ah, quand imprimons-nous Jadis et Naguère ou la Bonne Chanse [chanson] ? – à propos aussi, n’était-ce pas convenu que ce serait dorénavant 250 frs ? Expliquez-moi donc tout ça. Ça dépend, je pense du nombre d’exemplaires tirés, mais j’estime qu’il y va de notre intérêt commun de tirer plus que moins, au grand et franc jour ! Car, farceur ! mes livres se vendent bien, et que ce serait gentil qu’ils me procurent enfin une petite rente tout en faisant votre phortune à vous, non d’un chien !
Et tout à vous en N.D de la galtouze !
Verlaine
hop ! [hôpital] St Antoine
51 salle Bichot
Mettez donc un peu d’ordre dans mes autographes et paperasses reliées chez vous.
Procurez-moi donc au plus tôt – fables de La Fontaine.
Psyché et Amphitryon. »

 

Références :
Paul Verlaine, Oeuvres poétiques complètes, éd. Pléiade, p. 643-703