GAUTIER, Théophile (1811-1872)

Autograph poem signed « Théophile Gautier »
« [Paris], 10 Xbre [December] [185]1 », 2 p. in-8° (autograph on 1st and 4th pages)

« Ses yeux, où le ciel se reflète / Mêlent à leur azur amer / Qu’étoile une humide paillette / Les teintes glauques de la mer »

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GAUTIER, Théophile (1811-1872)

Autograph poem signed « Théophile Gautier »
« [Paris], 10 Xbre [December] [185]1 », 2 p. in-8° (autograph on 1st and 4th pages)
Revue de Paris letterhead – 10 rue du Bouloi
Some spots and ink smudges, four words crossed off by Gautier

Admirable poem dedicating the poetic art of Théophile Gautier, published in the first edition of his collection Émaux et camées

« Gautier is the exclusive love of Beauty, with all its subdivisions, expressed in the most appropriate language » (Charles Baudelaire, L’Art romantique)


« Cærulei oculi

Une femme mystérieuse,
Dont la beauté trouble mes sens,
Se tient debout, silencieuse,
Auprès des flots retentissants.

Ses yeux, où le ciel se reflète,
Mêlent à leur azur amer,
Qu’étoile une humide paillette,
Les teintes glauques de la mer.

Dans les langueurs de leurs prunelles,
Une grâce triste sourit ;
Les pleurs mouillent les étincelles
Et la lumière s’attendrit ;

Et leurs cils comme des mouettes
Qui rasent le flot aplani,
Palpitent, ailes inquiètes,
Sur leur azur indéfini.

Comme dans l’eau bleue et profonde,
Où dort plus d’un trésor coulé,
On y découvre à travers l’onde
La coupe du roi de Thulé.

Sous leur transparence verdâtre,
Parmi l’algue et le goëmon,
Luit la perle de Cléopâtre
Prés de l’anneau de Salomon.

La couronne au gouffre lancée
Dans la ballade de Schiller,
Sans qu’un plongeur l’ait ramassée,
Y jette encor son reflet clair.

Un pouvoir magique m’entraîne
Vers l’abîme de ce regard,
Comme au sein des eaux la sirène
Attirait Harald Harfagar.

Mon âme, avec la violence
D’un irrésistible désir,
Comme le blond guerrier s’élance
Vers l’ombre impossible à saisir

Montre son sein, cachant sa queue,
La sirène amoureusement
Fait ondoyer sa blancheur bleue
Sous l’émail vert du flot dormant.

L’eau s’enfle comme une poitrine
Aux soupirs de la passion ;
Le vent, dans sa conque marine,
Murmure une incantation.

” Oh ! viens sur ma couche de nacre,
Mes bras d’onde t’enlaceront ;
Les flots, perdant leur saveur âcre,
Sur ta lèvre, en miel couleront.

” Laissant bruire sur nos têtes,
Le Flot La mer qui ne peut s’apaiser,
Nous boirons l’oubli des tempêtes
Dans la coupe de mon baiser. “

Ainsi parle la voix humide
De ce regard céruléen,
Et mon cœur, sous l’onde perfide,
Se noie et consomme l’hymen.

Théophile Gautier »


Unpublished by Claudine Gothot-Mersch, this autograph manuscript is the oldest known for this poem, which, in all likelihood, served for its first publication in the Revue de Paris on January 1, 1852. There are numerous variations with the text published the same year in the first edition of the collection Émaux et camées. These include “Comme le blond guerrier s’élance” (Comme the blond warrior rushes forward) which becomes “Au milieu du gouffre s’élance” (St. 9,c), or “Sur ta lèvre, en miel couleront” (Honey will flow on your lips) which becomes “Sur ta bouche, en miel couleront” (St. 12,d). Furthermore, the poet repeats the line “Le Flot La mer qui ne peut s’apaiser” (St. 13,b) in order to avoid a repetition with the third line of the previous stanza. Most of the poems in Émaux et camées are constructed as octosyllabic quatrains; “Cærulei oculi” is no exception to this metric rule.

Here, the poet celebrates the captivating beauty of a woman’s eyes, which he describes as an inexhaustible source of fascination. The term “caerulei,” referring to deep blue, gives these eyes a celestial and divine dimension. True to his aesthetic, which prefigures Parnassus, Gautier places the gaze at the heart of the work as a symbol of pure and irresistible art, far removed from all morality.

Provenance:
Private collection

Bibliography:
Revue de Paris, 1er janvier 1852, p. 130-132
Émaux et camées, éd. Claudine Gothot-Mersch, Gallimard, 1981, p. 55-57