SARTRE, Jean-Paul (1905-1980)
Two autograph manuscripts for « L’Engagement de Mallarmé »
N.p, [1952], 2 p. in-4° in blue ink on graph paper
« Creature or creator, there is no other choice »
Fact sheet
SARTRE, Jean-Paul (1905-1980)
Two autograph manuscripts for « L’Engagement de Mallarmé »
N.p, [1952], 2 p. in-4° in blue ink on graph paper
Some repentirs by Sartre
Top margin slightly frayed for one of the two folios (without affecting the text)
Set of two unpublished preparatory texts for the opening of his essay « L’engagement de Mallarmé », which remained unfinished
We transcribe here one of the two folios :
« Ténébreux, debout en sa torsion de sirène ; autrement dit, Hamlet, ‘prince avec de l’écueil’, seigneur latent qui ne peut devenir, ou tout simplement Stéphane Mallarmé.
C’est que l’Europe, vers le même moment, avait appris une stupéfiante nouvelle, aujourd’hui contestée par quelques-uns : ‘Dieu mort. Stop. Intestat’.
À l’ouverture de la succession, ce fut la panique ; la bourgeoisie crut disparaître : Dieu mort, reste des hasards bousculés, l’homme en est un, il perd le statut de faveur que lui garantissait la Divine volonté. Adieu la création dont il était le roi : voici reparaître la Nature. La Nature détestée de 93. On commence à chuchoter que l’humanité n’est qu’une espèce : sur quoi va-t-on fonder l’ordre social. Une partie des classes dirigeantes tente de remplacer le Grand Mort par un manichéisme : la distinction ou refus radical de la nature ; une autre préfère recourir au réalisme. Mais l’existence d’une classe ouvrière en voie d’organisation se reconnaît à la présence d’un fort courant matérialiste. En économie, en philosophie l’esprit d’analyse triomphe : Dieu, c’était la dernière synthèse, le tout produisant et gouvernant des parties. Après lui, l’univers se disloque en atomes. Mode transitoire et fini d’une aveugle matière. L’être humain doit perdre tout espoir de se distinguer des autres combinaisons moléculaires à moins de produire par lui seul des effets que la nature ne produit pas, c’est-à-dire des synthèses irréductibles. Créature ou créateur, il n’y a pas d’autre choix. Malgré l’absurde légende qu’on répandu les survivants du Christianisme, l’athéisme fit des débuts modestes et c’est tout juste s’il ne s’annonça pas par une épidémie de suicides. Nos pères, acculés à faire leurs preuves ou à disparaître, ont recueilli l’héritage divin avec beaucoup d’hésitation… »
It can be seen, through these two preparatory pages that have remained unpublished, that the opening paragraph of the essay published in 1986 is taken from a much broader movement.
In 1960, Sartre confided to Madeleine Chapsal his “sympathy” for Mallarmé and Genet, “both consciously committed […] Mallarmé must have been very different from the image that has been given of him. He is our greatest poet. A passionate, a furious. And master of himself until he can kill himself by a simple movement of the glottis… His commitment seems to me to be as total as possible: social as well as poetic.”
Provenance:
B. & R. Broca collection
Bibliography:
Obliques, 1979, n°18-19
Mallarmé – La lucidité et sa face d’ombre, coll. Arcades, Gallimard, 1986, p. 15