GIONO, Jean (1895-1970)

Autograph letter signed « Jean » to Blanche Meyer
[Manosque] Friday evening [fall 1949], 3 p. in-8°

« I remember the sound of rain on the leaves and those great gestures both desperate and loving that the tall trees deploy in the autumn rain »

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GIONO, Jean (1895-1970)

Autograph letter signed « Jean » to Blanche Meyer
[Manosque] Friday evening [fall 1949], 3 p. in-8°

Tender letter of the writer to his secret love Blanche Meyer, who inspired the heroines of his most famous novels, including Pauline de Théus in Le Hussard sur le toit


« Chère Blanche,
J’espère que vous faites un bon retour. Je dis « vous faites » car à l’heure où je vous écris, vous êtes encore en route, vous êtes même si je ne m’abuse aux prises avec cette entrée de Marseille dont vous tremblez par avance. Entrée de Marseille dont moi aussi je parle comme je parlerais de l’Entrée de l’Enfer. Lasciate ogni
 speranza (ce qui, en bon français signifie Laissez toute espérance !). Je vous imagine donc en train de pénétrer dans les cercles de l’enfer au milieu des camions et des tramways. Cela se passe dans ces lointains bleuâtres et maléfiques que j’aperçois de la fenêtre de mon bureau du temps que je vous écris. Tout au moins puis-je espérer qu’il ne pleut pas là-bas où vous êtes. Il ne pleut pas ici non plus, mais quelle différence avec Grenoble. Le gréoulx boisé qui sent le champignon et la feuille morte. Ici le pays sent aussi le camion. Manosque n’est qu’une sorte de prolongation de Marseille et son parfum est d’huile lourde et d’essence brulée. Je me souviens du bruit de la pluie sur les feuilles et de ces grands gestes à la fois désespérés et amoureux que les grands arbres déploient sous la pluie d’automne.  Ces élancements de branches qui s’avancent comme le bras du compagnon s’avance à l’épaule de l’ami. Ces ramures qui s’ouvrent lentement de toutes leurs feuilles comme mains qui donnent. Où est cette épaule d’ombre vers laquelle s’avance avec tant d’amitié la belle ramure lourde de pluie ? À qui donne cette main de feuillage et que donne-t-elle ? J’aimerais recevoir d’elle si large et si fraiche une grande cargaison de bonheur et de paix.
Ici au courrier j’avais d’abord, le programme de Moby-Dyck qu’on joue à Paris
[au Théâtre Hébertot] avec grand succès ! Il contient un extrait de Pour saluer [Pour saluer Melville, essai paru en 1941, en hommage à l’auteur de Moby Dick(où se trouve un extrait authentique comme vous savez d’une lettre que vous m’écriviez de Nyons – en 1940 !!!). Si bien que vous êtes sur le programme. Je vous l’enverrai. Je joins aussi à ma lettre un morceau de la couverture de l’édition allemande de Triomphe de la vie… [essai paru en 1941] mais vous voyez qu’il annonce les aventures du Hussard Angelo [héro du Hussard sur le toit, qui allait paraître en 1951] et Faust au village [recueil de nouvelles publié en partie entre 1949 et 1951, et à titre posthume en 1977].
Ne tardez donc pas à les taper. Travail, travail, travail. Le sauvetage est pour moi de tourner les regards et le cœur vers une œuvre de plus en plus belle si possible. Me donner à l’œuvre. Mais, rien ne sera possible sans votre aide et votre affection.
Mes amitiés à Louis et Solaine.
Je vous embrasse
Jean »


Giono’s secret love from 1939 until his death in 1970, Blanche Meyer had a considerable influence on the writer’s work. She is the one behind the features of Adelina White in Pour saluer Melville, or the young Pauline in Theus in Le Hussard sur le toit. Giono will later on admit, it was “her”, or “pieces of her”.
As soon as Blanche has left, Jean imagines her in his letter in bad car traffic jams. Then between banter and magnificent metaphorization by the nature of his feelings in love, he tells her all his tenderness.

One of the very few letters from Giono to Blanche Meyer still in private hands
Almost all of their romantic correspondence was donated in 1975 to the Edwin J Beinecke Book Fund (Yale University).

Full scan of the letter on request